BOUVRON ET SES VILLAGES .
I
L'HISTOIRE DE BOUVRON ET DE SES VILLAGES
DU IXe au XVIIIe SIÈCLE.
1. L'ANNÉE 878.
Un don à l'abbaye de Redon.
C'est le 3 mai 878 que le chef breton Alain fait don de la paroisse de Bouvron aux moines bénédictins de l'abbaye Saint-Sauveur de Redon. Ainsi, depuis plus de 1130 années, Bouvron est sous le patronage du Saint-Sauveur.
Chaque année, jadis, le 6 août, jour de la fête du Saint-Sauveur, se tenait, dans le bourg, une importante foire, près de l'ancienne église médiévale Saint-Sauveur. Celle-ci a aujourd'hui disparu ; elle se trouvait sur l'actuelle place de l'Abbé Corbillé, le chevet à l'Est et, au Sud, son porche ou « chapitreau » selon le parler local.
Le Cartulaire de l'abbaye de Redon donne la forme suivante « buluuron » ; cette orthographe ne permet pas de fournir une étymologie assurée ; en revanche, aux XIe et XIIe siècles, les archives indiquent « boveron ». A partir de cette forme et en tenant compte d'autres lieux ainsi nommés en France, on peut proposer une origine gauloise et Bouvron signifierait « le ruisseau aux castors » ; ce ruisseau serait celui qui passe à l'est du bourg, non loin de la fontaine Saint-Sauveur, ainsi qu'au Châtel, près de la chapelle Saint-André.
La menace normande.
Le don de la paroisse de Bouvron s'effectue au cours d'une période fortement troublée par l'invasion des Normands dans le pays nantais. En juin 843, Nantes est pillée et brûlée par les Vikings, et une bonne partie de la population est massacrée. D'autres attaques suivent ; sont alors établies des colonies normandes à l'embouchure de la Vilaine et sur l'estuaire de la Loire. Bouvron n'échappe pas à ces incursions.
Cette invasion normande est largement favorisée par les querelles entre les chefs bretons Judicael et Alain, qui se disputent le partage du royaume de Bretagne. Toutefois, Alain parviendra à vaincre les Normands et sera alors surnommé Alain Le Grand ; il régnera seul sur la Bretagne de 890 à 907. C'est ce même Alain qui, en cette année 878, donne à l'abbaye de Redon la paroisse de Bouvron, dont le Cartulaire conserve l'acte citant cette « plebs quae uocatur Buluuron ». Mais à quoi correspond cette paroisse du IXe siècle ? Cette paroisse primitive se compose probablement des territoires actuels de Bouvron et de Fay, ainsi que d'une partie de Notre-Dame-des-Landes. Elle se situe dans la marche d'Armorique, où s'affrontent Bretons et Francs, où se rencontrent le breton et le roman.
Bouvron en breton.
Jusque vers la fin de ce IXe siècle, la langue bretonne est majoritairement parlée par la population bouvronnaise, le latin demeurant la langue des clercs. Les noms de lieux conservent le souvenir du breton parlé à Bouvron. D'une part, la finale des noms de domaines gallo-romains en –acum aurait dû évoluer en –ay, mais l'influence du breton a maintenu une finale en –ac dans Borsac, Quéhillac et Sordéac, ces trois noms désignant aussi des frairies. D'autre part, les Bouvronnais d'alors ont appelé en breton certains lieux dont les noms nous sont parvenus comme Le Bezou, Boudazin, Calan et Couamu ; Le Halliou est un nom breton qui pourrait rappeler une famille installée postérieurement.
Enfin, certains noms témoignent, sur le sol bouvronnais, d'une présence humaine probablement antérieure à l'année 878 : outre les noms de domaines en –ac, ce sont les noms qui désignent de petits lieux fortifiés, mais dont la destination reste imprécise : les deux Château-Gaillard et Le Châtelier. L'un des deux Château-Gaillard est situé à la limite orientale de la commune, au nord du bourg, près du « ruisseau aux castors », l'autre, à la limite occidentale de la commune, au nord de Villée, près d'un ruisseau. Si l'on joint ces deux Château-Gaillard par une droite, on note que celle-ci est quasi parallèle à la limite nord-ouest de la commune de Bouvron. Ces lieux auraient pu constituer les postes de défense d'un territoire ancien.
La paroisse de Bouvron était reliée à l'abbaye de Redon, dont elle dépendait, par le grand chemin nantais passant à Quéhillac.
2. LE XIIIe SIÈCLE.
Un trésor.
Non loin du grand chemin nantais, aux Aulnays, fut découvert, en mars 1968, un trésor contenu dans un pot en terre cuite, composé d'environ 1263 pièces, dont 448 monnaies royales françaises et 815 monnaies féodales parmi lesquelles 557 monnaies de Bretagne datant du règne de Jean Ier Le Roux, duc de Bretagne de 1237 à 1286.
L'église et le prieuré.
C'est probablement au cours du XIIIe siècle que fut édifié le chœur de la petite église Saint-Sauveur. L'intérieur de l'édifice, bien que modeste et sobre, était remarquable par ses deux piliers circulaires ornés, à la hauteur des chapiteaux, de figures sculptées. Cette église paroissiale et le prieuré Saint-André du Châtel ne dépendaient plus désormais de Redon mais de l'abbaye bénédictine de Saint-Gildas.
Le prieuré Saint-André avec sa chapelle était sous la protection d'un château médiéval, qui a donné son nom au village du Châtel. Le seul souvenir qui demeure aujourd'hui de la motte féodale se retrouve dans le nom de la parcelle La Motte. Au XIXe siècle, on pouvait encore observer les vestiges des fossés de la motte. Une léproserie avait été établie de l'autre côté du ruisseau. Le site du Châtel était dominé, à l'ouest, par le gibet seigneurial, installé dans la Lande des Justices. Le seigneur de Quéhillac tenait ses plaids généraux le lendemain de la foire de Saint-André, qui avait lieu le 30 novembre de chaque année au village du Châtel.
Un chemin de moines et de pèlerins.
Une autre motte féodale avait été édifiée au nord-est du village de La Voliais, elle aussi près d'un petit ruisseau. C'est à partir de cette motte que s'est développée la seigneurie de Quéhillac. L'actuel château de Quéhillac a été construit entre le site de la motte féodale et l'antique chemin nantais allant de Nantes à Rieux et Redon, itinéraire emprunté par les moines et les pèlerins, que devaient protéger les ordres religieux et militaires des Templiers et des Hospitaliers.
Ce chemin fut important au moyen âge puisqu'il permit aux moines bénédictins de Redon puis de Saint-Gildas de venir dans leur cure et leur prieuré de Bouvron. Les Bénédictins quittaient le chemin nantais pour atteindre le bourg de Bouvron à la hauteur de la vieille croix de Quéhillac.
Ce même chemin fut emprunté, en sens inverse, par les moines cisterciens de l'abbaye de Buzay, qui venaient de la rive sud de la Loire, et passaient par le Temple-Maupertuis. Ils vinrent établir un domaine agricole, nommé « grange », en la paroisse de Guenrouet, dans la boucle du Brivet, au-dessus du village de Brivé, au lieu appelé Bolhet, où a été reconstruite une chapelle. Cette grange cistercienne de Bolhet est attestée dans les années 1155-1170. Or, vers cette époque, un certain Pierre Guidon, sénéchal de Nantes à Bouvron, est cité comme témoin dans une transaction relative à la grange de Bolhet.
Les Cisterciens étaient étroitement liés aux Templiers qui protégeaient ainsi le parcours de Buzay à Bolhet en passant par le Temple-Maupertuis, les paroisses de Malville, Bouvron, Campbon, Quilly et Guenrouet où les Templiers et les Hospitaliers avaient des possessions. Les pèlerins pouvaient se désaltérer auprès de la vieille fontaine de Fonfaizon en Bouvron et de la fontaine Ste Catherine en Malville ; ils trouvaient aussi refuge auprès de la chapelle St Julien-l'Hospitalier, placée sous la protection des seigneurs de Villefrégon.
3. LE XIVe SIÈCLE.
La Guerre de Cent ans.
L'année 1337 voit le début de guerres opposant Anglais et Français durant une période d'une centaine d'années. En 1364, Jean IV de Montfort devient duc de Bretagne. Il est favorable au parti anglais.
La seigneurie de Quéhillac est vassale de Blain. En 1378, la paroisse de Bouvron, comme les autres paroisses dépendant de Blain, doit contribuer à la fourniture de matériaux pour la construction de bâtiments au château de Blain. En 1380, le seigneur de Blain, Olivier IV de Clisson, est nommé connétable de France, c'est-à-dire chef de l'armée française. Il fait notamment construire une imposante tour au château de Blain de 1380 à 1383 ; celle-ci existe toujours et est connue sous le nom de Tour du Connétable. À la même époque, en 1382, le duc de Bretagne ordonne la construction du château de l'Hermine à Vannes, où il fait emprisonner, en juin 1387, le connétable Olivier de Clisson, libéré ensuite contre rançon. Ainsi, Bouvron, paroisse du duché de Bretagne favorable aux Anglais est sous la dépendance du connétable de France.
En janvier 1392, le roi de France, Charles VI, signe un accord avec le duc de Bretagne. Toutefois, Olivier de Clisson ayant été victime d'un attentat attribué aux Bretons, le roi de France lance des représailles contre la Bretagne. Finalement, Olivier de Clisson se réconciliera avec le duc de Bretagne.
Le 17 juillet 1453, la bataille de Castillon mettra fin à la Guerre de Cent ans.
Les seigneurs de Maure.
Dans une charte de 1287 précisant les principales divisions ecclésiastiques du diocèse de Nantes, la paroisse de Bouvron est mentionnée comme faisant partie du doyenné de la Roche-Bernard. La paroisse doit alors payer une redevance au seigneur de Rochefort, à qui appartient la seigneurie de Quéhillac.
Quéhillac passe aux seigneurs de Maure quand Aliette de Rochefort, dame de Quéhillac, épouse Jean de Maure. C'est de la famille de Maure, originaire du diocèse de Rennes, que dépendra désormais la seigneurie de Quéhillac du XIVe au XVIe siècle. Ce sont les armoiries des Maure qui vont figurer sur le principal vitrail de l'église de Bouvron, au-dessous de celles des ducs de Bretagne, jusqu'au XVIIe siècle : il s'agissait d'un « écusson au croissant de vair en champ de gueule ». Le fief de Maure s'étendait jusque sur la paroisse de Fay.
De 1385 à 1413, la seigneurie de Quéhillac dépend de Jean de Maure. Dans un document de 1397, « Jehan, seigneur de Maure », rend aveu à son « très noble et très puissant seigneur, Monseigneur de Clisson, en sa châtellenie de Blain » pour son domaine de Quéhillac. Ce document permet d'avoir un état du fief de Quéhillac qui comprend notamment l' « herbregement » de Quéhillac, demeure qui a précédé le château actuel ; les « bois anciens et vénérables » de Quéhillac, d'autres bois et taillis, des étangs, des moulins et autres terres ; une maison et un four situés dans le bourg de Bouvron, « au derrière de l'église », c'est-à-dire près de la Malrue ; enfin, la tour médiévale de Campbon ainsi que diverses autres possessions tant sur Campbon que Fay.
4. LE XVe SIÈCLE.
La famille Raboceau.
Le 4 janvier 1453, en la ville de Châteaubriant, le duc de Bretagne, Pierre II, accorde à son secrétaire Pierre Raboceau des lettres de franchise et d'exemption de fouage, pour trois maisons et herbregements, dont l'un situé au bourg de Bouvron, en la Malrue. C'est de cette Male Rue ou « mauvaise rue » que partait le chemin de Fresnée, conduisant à l'herbregement de Fresnée attesté en 1420. Près du bourg existait naguère un lieu appelé « le clos Raboisseau » qui doit conserver le souvenir de la famille Raboceau. Pierre Raboceau avait épousé une fille de Thomas Moreau. En 1468 vivait à Bouvron un certain Denis Raboceau.
Les familles Benoist et Couëron.
Le 25 juin 1460, l'écuyer Jamet de Dréneuc, seigneur de Lévrisac, déclare posséder le fief de Bourbidan dépendant de « noble et puissant le sire de Maure, de Bonnaban et de Quéhillac ». Dix ans plus tard, il confirme, en la cour de la seigneurie de Fresnay, sise en Plessé, être « homme féal de noble et puissant le seigneur de Maure et de Quéhillac pour le fief de Bourbidan » que tiennent Alain Besnoist et sa femme, ainsi que Jean et Félix Couëron. En 1466 un certain Guillaume Benoist vit à la Benoistais qui compte un herbregement mentionné en 1480. D'autre part, les archives signalent la présence de Michel Couëron à la Couëronnais en 1464.
La rivière d'Isar
Le « ruisseau aux castors » qui a donné son nom gaulois à Bouvron se jette actuellement dans l'ancien canal de Nantes à Brest qui a pour origine la rivière appelée Isar. Le nom actuel d'Isac est apparu au XVIIe siècle ; c'est une altération, par fausse analogie avec les noms en –ac, du nom Isar, à rapprocher de la rivière l'Isère par exemple. Ce nom se retrouve en Notre-Dame-de-Grâce, dans le village de Lévrisac , ancien « Lévrisar » attesté dès 1210.
Foix et Bretagne.
En 1460, le duc de Bretagne, François II, fonde l'Université de Nantes. De son mariage avec Marguerite de Foix naîtra Anne, future duchesse de Bretagne et deux fois reine de France. Cette reine de France, bretonne par son père, était aussi de prestigieuse lignée, du côté maternel, par les comtes de Foix dont le puissant château domine encore les Pyrénées orientales. Les plus illustres comtes de Foix furent Gaston Phébus et Henri IV, le dernier à porter le titre de comte de Foix. Roger II, comte de Foix, prit part à la première croisade accompagné de son filleul le chevalier Bernard de Lapasse
Bouvron compte aujourd'hui des descendants du chevalier de Lapasse issus de deux branches différentes. Les Lapasse en effet ont contracté diverses alliances bretonnes. Ainsi, on peut voir, à la base d'un vitrail de la chapelle St François-Xavier, à Vannes, le blason Lapasse associé au blason La Bourdonnaye. Marie de Lapasse, née en 1828, fille du vicomte de Lapasse, avait en effet épousé, en 1846, le marquis de La Bourdonnaye-Blossac. Leur fille Jeanne épousa René Harscouet de Saint-Georges. La famille de Sagazan, originaire aussi du Midi mais bien implantée en Bretagne, compte des ancêtres Lapasse. Enfin, parmi des alliances récentes, on remarque la famille de L'Estourbeillon.
François II fut duc de Bretagne de 1458 à 1488. Le tombeau de François II et Marguerite de Foix, placé dans la cathédrale de Nantes, compte parmi les chefs-d'œuvre de la sculpture de la Renaissance.
5. Le XVIe siècle.
Un premier registre paroissial.
Le plus ancien acte de baptême de la paroisse de Bouvron conservé aujourd'hui date de 1504. Il faudra attendre le 10 août 1539 pour que l'ordonnance de Villers-Cotterêts impose à tous les curés des paroisses du royaume de France la tenue de registres de naissances et de baptêmes. Toutefois, dès 1480 environ, le diocèse de Nantes était l'un des seuls en Europe à posséder un texte prescrivant la tenue de registres paroissiaux. Dès lors, le département de Loire-Atlantique est le plus riche de France en registres anciens.
Le 18 novembre 1504, Anne de Bretagne est couronnée, en grande pompe, à Saint-Denis, reine de France.
Bretagne et France : l'union.
Le 6 août 1532, le roi de France, François Ier, marié à Claude de France, fille d'Anne de Bretagne, accorde aux États de Bretagne l'octroi des droits, libertés et privilèges dont les Bretons demandent le respect. Le 13 août, l'édit d'union de Nantes intègre le duché de Bretagne à la couronne de France, tout en confirmant les franchises, surtout fiscales, de la Bretagne.
Seigneurs de Bouvron.
À Bouvron, tandis que la seigneurie de Vilhouin appartient à la famille Lebel, et celle de Villefrégon à la famille Cybouault, le domaine de Quéhillac a toujours pour maître un seigneur de Maure. En cette année 1532, c'est François de Maure, marié à Hélène de Rohan, qui est le maître de Quéhillac. En 1553, il portera le titre de comte de Maure ; l'année suivante, il épousera Françoise de Pompadour. Pendant ce temps, la famille Fourché, avant de posséder à son tour Quéhillac, développe ses alliances et ses acquisitions à Bouvron et dans le pays nantais.
Au cours de l'année 1532 les populations du pays nantais sont touchées par des inondations, une épidémie et la famine.
La première guerre de religion.
La guerre opposant catholiques et protestants débute le 1er mars 1562; elle s'achèvera en mars 1563. La région va alors être marquée par quelques troubles à la Roche-Bernard, en mars, et à Guérande, en avril.
Le diocèse de Nantes connaît des mouvements protestants dès 1550 environ. Le château de Blain, avec les Rohan, va devenir un important fief huguenot de Bretagne. Les premiers baptêmes protestants y sont enregistrés en 1559. C'est au château de Blain que naîtra, en 1579, Henri de Rohan qui sera chef des huguenots français après la mort de Henri IV. À la fin de 1562, l'Église protestante de Blain accueille son premier pasteur en titre, et la messe catholique est interrompue dans l'église paroissiale. Blain devient une capitale huguenote, mais n'influençant guère Bouvron.
Seule la petite seigneurie de Vilhouin, en effet, sera huguenote, avec les Pineau, au milieu du XVIIe siècle ; mais la tiédeur de leur zèle ne résistera pas à la révocation de l'Édit de Nantes. La seigneurie de Quéhillac et généralement la paroisse de Bouvron demeurent un fief catholique. En cette année 1562, le seigneur de Quéhillac est le comte Claude de Maure, fils de François de Maure et d'Hélène de Rohan. En 1554, il avait épousé Françoise de Pompadour.
Une royale lettre.
Le 23 août 1568 commence la troisième guerre de religion.
Le 5 juin 1569, le roi de France Charles IX écrit à sa « très aimée cousine Françoise de Pompadour, comtesse douairière de Maure, veuve de messire Claude de Maure, pour sa terre et seigneurie de Quéhillac ». Le roi demande à tous ses lieutenants généraux, gouverneurs, capitaines et divers chefs de troupes d'infanterie et de cavalerie de ne pas loger eux-mêmes ni de permettre à leurs troupes de loger sur le domaine de la seigneurie de Quéhillac.
Mercoeur, gouverneur de Bretagne.
En 1582, Philippe de Lorraine, duc de Mercoeur, est nommé par son beau-frère le roi Henri III, gouverneur de Bretagne. Allié aux Guise, c'est un ardent défenseur de la foi catholique, comme l'atteste son rôle dans la Sainte Ligue. Quand il arrive à Nantes, la situation est difficile pour les populations. Durant les années 1582-1583, en effet, le diocèse de Nantes connaît la peste et la sécheresse. De 1588 à 1598, le duc de Mercoeur, comme chef de la Ligue en Bretagne, va gouverner Nantes en l'isolant du reste du royaume.
L'ascension de Jean Fourché.
En 1588, Jean Fourché, dont la famille est en partie bouvronnaise, étant ingénieur à Nantes, commande l'artillerie du duc de Mercoeur ; celui-ci le charge de faire exécuter de nouvelles fortifications dans la ville de Nantes. On retrouve encore aujourd'hui des vestiges de ces travaux sur les remparts sud-est du château de Nantes où avaient été réalisées, en pierre, d'imposantes croix de Lorraine, rappelant que le duc de Mercoeur était aussi Philippe de Lorraine.
Comme il est un fidèle partisan de Mercoeur, Jean Fourché devient sous-maire de Nantes en 1588-1589. Il fera aussi partie d'un conseil insurrectionnel qui va notamment confisquer les biens des protestants.
Le seigneur brigand et le coffre de Quéhillac.
Le 18 novembre 1589, Françoise de Pompadour, comtesse de Maure, écrit à Jean Fourché pour lui dire qu'elle a demandé à Jean de Montauban, seigneur du Goust en Malville, de rendre le coffre et les lettres qui ont été pris par lui, à Bouvron, chez M. Fourché.
Comme le duc de Mercoeur n'obéit plus au pouvoir royal, le roi nomme le jeune prince de Dombes gouverneur de la Bretagne. C'est alors que celui-ci envoie une lettre à Jean de Montauban, capitaine et gouverneur du château de Blain : « Monsieur du Goust, j'ai su que vous et quelques autres étiez entrés en la maison de Quéhillac appartenant à Madame la Comtesse de Maure, de laquelle vous avez fait emporter un grand coffre de bois où sont tous les titres de la seigneurie de Quéhillac. » Il ajoute : « Je vous prie incontinent de rendre ledit coffre et tout ce qui était dedans sans permettre qu'il soit rien perdu des papiers et autres choses qui auront été pris en ladite maison. » Il déclare enfin prendre aussi en sa protection les fermiers et sujets de la seigneurie de Quéhillac.
Jean de Montauban profite des troubles de la guerre pour faire des incursions autour de Blain, en pillant et tuant, jusqu'à sa reddition en 1591. Un rapport précise que les soldats de Jean de Montauban commettent quotidiennement « toutes sortes de méchancetés, même des meurtres », sans être punis ; ainsi, on les voit tuer, dans le cimetière de Bouvron, Pierre Boudazin. Le rapport ajoute : « les soldats ne laissaient aucun meuble ni provisions par les maisons ».
Une chère paix.
Le 22 décembre 1596, Jean Fourché est élu maire de Nantes.
Devant les échecs successifs de ses troupes et de ses alliés, le duc de Mercoeur pense à vendre sa reddition au roi Henri IV. Le 20 mars 1598, par le traité d'Angers, le duc de Mercoeur renonce à son gouvernement de Bretagne et s'engage à remettre au roi la ville et le château de Nantes. Il obtient en échange notamment dix millions d'écus, plus que le budget de la Couronne de France, pour lui et ses partisans. Or, parmi ses proches partisans se trouve Jean Fourché. En outre, Henri IV ayant été satisfait des talents de Jean Fourché comme diplomate dans la reddition de Mercoeur, accorde à celui-ci, pour compenser la perte de sa charge de maire de Nantes, celle de maître des Comptes de Bretagne.
Un nouveau château pour un grand destin.
C'est probablement à partir de la belle cagnotte procurée par le roi Henri IV que Jean Fourché, seigneur de la Courousserie, fait édifier ou remanier le château de Quéhillac, de style Henri IV, que l'on peut admirer encore aujourd'hui. La population de Bouvron compte alors environ 1200 habitants, davantage que celle de la paroisse de Savenay.
La petite-fille de Jean Fourché, Louise Fourché, épousera à Nantes, en janvier 1640, l'illustre Nicolas Foucquet, l'écureuil maudit.
6. Le XVIIe siècle.
Un mariage historique.
En janvier 1640, à Nantes, l'archidiacre Jean Fourché célèbre le mariage de sa nièce, Louise Fourché, héritière de Mathieu Fourché, seigneur de Quéhillac, avec Nicolas Foucquet.
Les Fourché possédaient diverses terres en Bouvron, dont la seigneurie de Quéhillac ; mais Guyonne Bouriau, la mère de Louise Fourché, résidait surtout à Nantes, rue de Verdun, non loin de l'Hôtel de Ville, où Jean Fourché exerça sa fonction de maire.
Nicolas Foucquet, seigneur de Quéhillac.
En février 1641, Louise Fourché met au monde une fille Marie ; mais, à la suite de cette naissance, elle meurt le 21 août, à Paris. Nicolas Foucquet devient seigneur de Quéhillac comme tuteur de sa fille.
Les armes des Foucquet, dont le nom s'orthographiait ainsi au XVIIe siècle, et non Fouquet, représentent un écureuil, avec pour devise « Quo non ascendet ? » c'est-à-dire « Jusqu'où ne montera-t-il pas ? ». L'écureuil Foucquet, seigneur de Quéhillac, montera jusqu'à devenir l'un des plus puissants personnages du royaume de France.
Nicolas Foucquet, bien qu'étant le principal seigneur de la paroisse de Bouvron, n'y est jamais venu. Il rencontrait les Fourché à Nantes, chez sa belle-mère. En 1645, il est à Nantes pour un baptême et il en profite pour régler une partie de la succession Fourché. En 1646, il engage la vente des vieux bois de la seigneurie de Quéhillac. En 1650, il perd son procès contre un seigneur de Fay. En novembre 1653, devenu surintendant des Finances, il vend la plupart des rentes Fourché. Le 16 décembre, il vend Quéhillac à son cousin Fourché.
Le 5 septembre 1661, Louis XIV est à Nantes où il fait arrêter, par d'Artagnan, son surintendant Nicolas Foucquet. Après un procès injuste, celui-ci est condamné à la prison à vie, victime de la jalousie de Colbert.
Des descendants bretons.
Quelques années après la mort de Louise Fourché, Nicolas Foucquet s'était remarié et avait eu cinq enfants, dont il ne subsiste aucun descendant. En revanche, c'est de sa fille Marie Foucquet, fille unique de Louise Fourché, dame de Quéhillac, qu'est issue la seule descendance actuelle, qui compte des familles de l'ancienne noblesse de Bretagne.
7. Le XVIIIe siècle.
La chute du clocher.
En janvier 1709, un froid exceptionnel frappe le royaume de France et sévit jusqu'à la mi-mars . Les blés semés durant l'automne 1708 sont totalement détruits. Ce qui aura pour conséquence une grande disette. Le Père de Montfort commence à prêcher des missions dans le doyenné de la Roche-Bernard, notamment pour l'organisation de secours afin de faire face à cette dure année de famine.
Le 20 juin 1709, le clocher de l'église de Bouvron tombe, entraînant avec lui une partie de la toiture. Ce clocher consistait en deux fenêtres montées sur le pignon de l'église où étaient les deux cloches, au-dessus de l'entrée ouest.
Une église rénovée.
Le nouveau clocher de l'église Saint-Sauveur sera établi plus au-dessus du choeur, sur les deux piliers des chapelles de la Vierge et de Saint-Pierre. Les cloches y sont placées le 9 janvier 1713. Une partie de la toiture s'étant écroulée, la charpente avait dû être refaite à neuf jusqu'à la voûte du chœur. C'est pour cette charpente que fut détruit le bois du presbytère, sans doute l'ancienne « petite forêt » dont le chemin à l'est du bourg garde le souvenir. Le seigneur de Quéhillac, Pierre Fourché, offrit de son bois pour terminer les travaux de l'église.
Durant tous ces importants travaux, la messe avait lieu dans la chapelle Saint-Mathurin ; le conseil paroissial en profita alors pour rehausser le sol intérieur de l'église jusqu'à la chaire, et pour rabaisser le sol du cimetière, autour de l'église. Le 21 novembre 1713 fut rétabli le culte dans l'église rénovée.
Le cousin de l'écureuil .
Le 20 mars 1714 naît, au château de Quéhillac, Paul-Armand Fourché, fils de Pierre Fourché et de Geneviève Menand. Il ne sera baptisé que le 23 octobre 1720 en l'église Saint-Pierre d'Ancenis, ville où résidaient ses cousins Béthune-Charost. Son parrain était en effet Paul-François de Béthune, duc de Charost, pair de France, baron d'Ancenis, arrière-petit-fils de Nicolas Foucquet et de Louise Fourché.
Lemée à Villefrégon.
Des actes de 1735 à 1737 mentionnent un certain Charles Lemée, marchand, « demeurant au lieu noble de Villefrégon ». Les Lemée étaient originaires de Blain ; on les trouve alors comme marchands-tanneurs , qualifés d' « honorables personnes », habitant sur les bords de la rivière d'Isar. Cette vieille famille blinoise comptait bon nombre d'alliances avec les familles de notables de la région de Blain.
Fourché à Quéhillac.
Paul-Armand Fourché est reçu page de la Petite Écurie du roi, en avril 1735. Il deviendra conseiller au Parlement de Bretagne le 7 mars 1749. Il est alors pompeusement nommé : « Messire Armand-Paul Fourché, chevalier, seigneur de Quéhillac, Maure, la Villefrégon, Vilhouin en Bouvron et Vilhouin en Campbon, demeurant ordinairement au château de Quéhillac. »
Le début d'un long procès.
La « Déclaration des rentes et revenus seigneuriaux dus à la seigneurie de Quéhillac » mentionne l'existence de plusieurs terres et communs dans l'étendue de la seigneurie servant pour les pâturages des bestiaux des « sujets de la seigneurie » ; sur ces terres, « il y a plusieurs chênaies qui sont communes et servent tant pour la décoration des villages que pour servir à empêcher les vents qui pourraient par impétuosité ruiner et abattre les couvertures des maisons ».
Or, le seigneur de Quéhillac ne respectera pas les droits des « sujets de la seigneurie » relatifs à ces terres communes. C'est pourquoi des paysans de Bouvron vont porter plainte, en cette année 1752, contre le seigneur de Quéhillac. Ce sera le début d'un fort long procès.
La plainte des paysans.
Des paysans de Bouvron, vassaux de la seigneurie de Quéhillac, portent plainte contre le seigneur de Quéhillac, Paul-Armand Fourché. Ils ne peuvent plus supporter les actions quotidiennes qu'entreprend leur seigneur sur les communs de la seigneurie de Quéhillac, ainsi que sur les arbres des chênaies. Celui-ci s'est en effet complètement accaparé les communs des villages bouvronnais dépendant de la seigneurie de Quéhillac.
Les plaignants affirment qu'ils « se trouvent dans la nécessité de se pourvoir en justice » s'appuyant sur une Ordonnance de 1669 qui considère que le seigneur n'a droit qu'à un tiers des communs « supposant que les deux autres tiers soient suffisants pour l'usage des vassaux. ».
Pour ne pas trop froisser la susceptibilité seigneuriale, les paysans précisent : « Il ne faut pas que le seigneur de Quéhillac s'imagine que ce soit ni mauvaise humeur de la part des suppliants, ni dessein de le tracasser ni de lui nuire, qui les fassent agir. Pour peu qu'il aime à se rendre justice, il doit reconnaître que sa façon d'en agir avec eux à tous égards, les a réduits à cette extrémité. » Et suit une belle sentence : « Un seigneur qui aime ses vassaux et qui veut s'en faire aimer, les protège, loin de chercher à les opprimer ».
Les plaignants néanmoins en viennent au vif du sujet : M. Fourché « ne s'attache qu'à leur susciter des procès et des contestations, et même à les dépouiller de leurs droits et les réduire à la dernière misère, en voulant les priver de ce qui serait absolument nécessaire pour la subsistance de leurs bestiaux, pour les réparations urgentes et nécessaires, et pour mettre leurs maisons à couvert de l'impétuosité des vents et des pluies. Enfin, M. Fourché voudrait disposer à son profit de tout ce qui est réputé être des communs dans ses fiefs ; et il ne chérit que ceux qui par complaisance pour lui ou pour leur intérêt particulier veulent bien entrer dans ses vues. » Le rapport, signé par Jean-Armand Maugendre, accuse aussi M. Fourché d'exercer un pouvoir autoritaire sur les vassaux de Quéhillac « soit en intimidant les uns, soit en cherchant à séduire les autres par de belles paroles ou promesses. »
La liste des suppliants s'allonge.
Les plaignants de 1752 étaient au nombre de vingt-cinq « laboureurs et paroissiens de Bouvron », auxquels s'ajoutaient les noms de laboureurs de Joursac et Tartifume en Campbon. Loin d'être intimidés par M. Fourché, d'autres plaignants vont s'ajouter à la liste en 1753, dont des laboureurs de La Baratrie et La Caillonnais en Campbon.
Voici la liste des plaignants bouvronnais, répartis selon les villages :
Bardou : Clément Lambert.
La Basse-Ville : Pierre Héridel.
La Bélinais : Jean Bonnet, Françoise Gérard, veuve de Jean Olivier, Mathurin Gerbaud, Jean Guitton, Julien Legoux, Paul Maillard, Pierre Olivier.
La Benoistais : François Bosseau, Jean Durand, Jean Garnier.
La Biliais : Pierre Bonnet, Jean Gougeon.
La Bréhaudais : Roland Davy, Julien Gatepaille, François Guitton, Mathurin Yver.
Le Châtel : Julien Bonnet, Joseph Sorin, Pierre Sorin.
Le Cornolay : Mathurin Billy, Pierre Clément.
Le Doux : François Burban.
Le Friche Blanc : Pierre Martin.
La Furetais : Julien Maillard, Pierre Maillard.
Le Grand-Maumesson : Mathurin Bugel.
La Guihardais : Pierre Champion, Jean Roland, Pierre Roland.
La Guinais : Jean Yver, Julien Yver.
La Haie : Julien Gatepaille, Pierre Gatepaille, Jean Lambert, Pierre Lambert, Mathurin Ménard.
Le Halliou : François Couëron, François Olivier fils, Mathurin-Jean Rolland.
La Hériais : Jean Pineau, Joseph Pineau.
La Janvrais : Pierre Dabout, Adrien Durand, Olivier Gerbaud, Jean Sicard.
La Maugendrais : Jean Boudazin, Perrine Bouvier, veuve François Guitton, Pierre Drouaud, François Gatepaille, Mathurin Gougeon, Pierre Héraut, Guillaume Marchand.
La Mouraudais : Pierre Benoistel, Julien Dabout, Louis Olivier, Julien Sicot.
Paribou : Marguerite Maillard, veuve de François Babin, Pierre Maillard, Toussaint Pineau.
Le Pas : Julien Burban, Jean Douaud, Pierre Legoux, Perrine Olivier, veuve Pierre Legoux.
La Resnais : Olivier Bonnet, Jean Gatepaille, Mathurin Héridel.
Sordéac : Olivier Bessac, Julien Guinel, Julien Jahier, Guillaume Jarnou, Jean Jarnou, Pierre Jarnou.
La Voliais : Guillaume Bugel, Jean Bugel, Mathurin Bugel, Guillaume Gouret.
Un seigneur peu conciliant.
Un rapport du Conseil d'État du roi, tenu à Versailles le 24 décembre 1754, rend compte du procès. Il rappelle que les habitants dépendant des seigneuries de Quéhillac, Villefrégon et Vilhouin en Bouvron et Campbon ont fait assigner devant la Maîtrise des Eaux et Forêts de Nantes le seigneur de Quéhillac qui a vendu des landes et communs de villages. M. Fourché a « également fait abattre et vendre à son profit les chênes et autres arbres que les vassaux et habitants avaient plantés » sur des enclaves de la seigneurie et « sur les chemins aboutissant à leurs villages ». M. Fourché a dès lors intenté des procès contre les paysans qui se plaignaient et a ainsi occasionné leur « ruine entière ».
Si les paysans en appellent au Roi de France, c'est parce que M. Fourché a contesté la compétence de la Maîtrise de Nantes. M. Fourché affirme qu'il a la propriété exclusive de toutes les terres vagues de sa seigneurie, à l'exception des terres nommées « defay ». En revanche, les paysans s'appuient sur des aveux des XVe et XVIe siècles rendus au seigneur de Quéhillac affirmant qu'ils ont la possibilité de « pâturer leurs bêtes sur les communs de la seigneurie, de temps immémorial » ; et ce droit dont jouissent les vassaux de la seigneurie est dû aux corvées et à la banalité auxquelles ils sont sujets.
L'arrêt du Conseil d'État du roi.
« Il plut à sa Majesté ordonner » que les habitants dépendant de la seigneurie de Quéhillac gardent leurs droits d'usage sur les landes et les terres vagues ; le roi fait « défense au sieur Fourché de troubler » ses vassaux « sur quelque prétexte que ce soit ». Il le condamne à « leur délaisser toutes les terres vagues et landes faisant partie des communs » ; il le condamne aussi à « 30000 livres de dommages et intérêts envers eux, pour les chênaies et arbres coupés et vendus, et pour les non-jouissances des communs par lui vendus et aliénés au préjudice des dits habitants. »
Le 24 mai 1755, M. Fourché s'oppose à l'arrêt du Conseil d'État.
Le 21 décembre 1756, le roi, en son Conseil d'État, ordonne que soit « procédé à l'arpentage général et à la levée du plan figuratif des landes, bruyères, terres vagues et communes situées dans l'étendue de la seigneurie de Quéhillac ».
Des Bouvronnais sous pression.
Une ordonnance des Eaux et Forêts de France demande, pour l'application des arrêts du roi, que les marguilliers de la paroisse de Bouvron, comme représentants des habitants, se réunissent pour prendre les décisions idoines.
Pierre Thébault, procureur du roi, est chargé de mettre en œuvre ce qui est ordonné. Mais il rencontre des difficultés qu'il consigne dans un rapport : « Le Général de la paroisse (structure qui administre la paroisse) s'assembla pour délibérer, mais les douze notables qui le représentèrent furent obligés de se séparer sans rien arrêter, parce que le procureur fiscal de M. Fourché se trouvant à leur assemblée, celui-ci voulut captiver leurs suffrages et les forcer à prendre une délibération conforme aux intentions de leur seigneur. » Pierre Thébault demanda alors, par voie d'affiches aux portes des églises de Campbon et Bouvron, que tous ceux qui étaient concernés par les communs s'assemblent « par frairies » pour nommer des représentants.
Le résultat fut qu'un peu plus de quatre-vingts habitants répondirent favorablement à ces requêtes ; en revanche, deux cent trente environ « gardent le silence, les uns parce qu'ils sont ou afféagistes ou partisans de M. Fourché, et les autres parce qu'ils sont intimidés par le seigneur ou ses officiers ».
Le 23 mai 1757, le Grand-Maître des Eaux et Forêts de Bretagne répond au rapport du procureur Pierre Thébault, et ajoute : « Faisons défenses expresses au procureur fiscal de M. Fourché et à toutes autres personnes à lui attachées, de se trouver sous quelque prétexte que ce soit aux assemblées des dits habitants, pour en troubler et empêcher les suffrages. »
Un document historique.
En février 1758, Mathurin Forestier, arpenteur, établit le « Plan général et géométral de toutes les landes, terres vagues et communes, villages, chênaies et rues dans l'étendue de la seigneurie de Quéhillac, Villefrégon et Vilhouin, en la paroisse de Bouvron. »
Ce plan est conservé à Paris aux Archives Nationales de France. C'est un document exceptionnel pour l'histoire de Bouvron puisqu'il dresse le premier plan des terres et villages d'une bonne partie de la commune actuelle, près de quatre-vingts ans avant le premier cadastre. Ce document est accompagné d'un dossier contenant de nombreux documents d'archives relatifs aux aveux des vassaux bouvronnais de la seigneurie de Quéhillac.
Une France dans tous ses états.
Le 24 janvier 1789 sont envoyées les lettres de convocation pour la tenue des États généraux à Versailles le 27 avril 1789.
Le dimanche 5 avril 1789, quarante-deux paroissiens de Bouvron se réunissent pour rédiger le cahier de doléances de la paroisse. Ce cahier est établi d'après un modèle proposé. Néanmoins, des articles gardent le souvenir du procès avec le seigneur de Quéhillac :
« Nous nous plaignons de la prétention de nos seigneurs qui pensent que les terres vagues et communes leur appartiennent et font partie de leurs domaines, lorsque, suivant le droit naturel, elles doivent appartenir à tous. »
« Nous souhaitons que par rapport à l'affaire particulière des habitants de la paroisse de Bouvron, relativement aux communs pour laquelle il y a procès pendant au Conseil de Sa Majesté, ils donneront à leurs députés des instructions particulières à proposer à messieurs les députés aux États Généraux pour solliciter un arrêt définitif et leur donneront les nouveaux moyens qu'ils auront à proposer, leur donnant tout pouvoir de le faire, même de consulter trois avocats sur la marche que l'on devra tenir à cet égard. »
Des prêtres réfractaires.
Le 27 juin 1791, Nicolas Corbillé, vicaire de la paroisse de Bouvron ayant refusé de prêter le serment à la Constitution Civile du clergé, doit quitter la paroisse. Il revient toutefois le 15 août afin d'aider le recteur François Delamarre pour la fête de l'Assomption. Alors que le Directoire de Nantes lui demande de se rendre à Nantes, l'abbé Corbillé entre dans la clandestinité, tout en apportant son aide au recteur. Il se cache au Bezou. Le 4 décembre, la municipalité de Bouvron intervient en faveur des prêtres réfractaires.
En mars 1792, le recteur de la paroisse, François Delamarre, est arrêté. Il avait refusé de prêter le serment à la Constitution Civile du clergé. Il fut emprisonné à Savenay, jugé et acquitté le 24 juin. Il se retira à Nantes pour s'y cacher, mais il fut dénoncé. Arrêté de nouveau le 11 septembre, il est transféré dans diverses prisons et sera noyé en Loire le 16 novembre 1793.
En mai 1792, un rapport du district de Savenay signale que Nicolas Corbillé réside bien à Bouvron « tantôt sous le costume d'un mendiant, tantôt sous celui d'un matelot. Il va de village en village prêcher le fanatisme, la désobéissance aux lois, la révolte contre les autorités constituées, au point que celles-ci n'osent plus paraître. Il dit la messe dans des maisons particulières. » Le district dénonce « la marche audacieuse du sieur Corbillé, la marche anticivique de la municipalité ». Le 12 juin, l'abbé Jacques Flochmoën, desservant la chapelle du château de Quéhillac, une fois arrêté et conduit à Nantes, prête le serment à la Constitution Civile du Clergé, afin de recouvrer la liberté.
Le 22 septembre, c'est le début de l'An I de la République française.
Les Vendéens.
Le 24 février 1793, la Convention décrète la levée de 300000 hommes âgés de 18 à 25 ans. La Vendée réagit à ce décret.
Le 5 mars, des citoyens bouvronnais sont allés déclarer à la municipalité de Couëron que les Bouvronnais se sont insurgés dans le bourg à l'instigation de prêtres qui, déguisés, se cachent dans la paroisse. Bouvron est en effet l'une des premières communes de Loire-Inférieure à réagir à la venue des commissaires chargés du recrutement de soldats. Le 9 mars, un détachement de cinquante cavaliers, de la Garde Nationale de Paimboeuf, est envoyé à Bouvron pour rétablir l'ordre. Les administrateurs du district de Savenay ont des craintes, à juste titre. Les 11 et 12 mars, les Bouvronnais joints à d'autres habitants de paroisses voisines, attaquent Savenay, et s'en emparent. Puis, à la mi-mars, l'insurrection gagne tout le département de la Loire-Inférieure.
L'Armée Catholique et Royale se constitue. A la fin de septembre, on signale la présence de deux cents hommes armés à Bouvron. Un rassemblement s'était établi dans les Bois de Moëre « où les habitants des campagnes devaient se joindre ». Au cours de l'automne, c'est la Virée de galerne qui, après avoir traversé la commune de Bouvron, s'achève à Savenay le 23 décembre. Les conséquences de ce soulèvement seront terribles : les troupes infernales dévasteront la Vendée.
Probablement le 14 avril 1794, un détachement du Ve Bataillon des Volontaires de la Manche, en garnison à Bouvron, opère une perquisition au village du Bezou, chez Perrine Couëron, veuve d'Antoine Guitton, vivant avec sa fille Marie. Dans la maison, ils découvrent l'abbé Corbillé, qui se faisait passer pour le domestique de Perrine Couëron. Le prêtre réfractaire et les deux femmes sont arrêtés et conduits à Bouvron. Mais, comme l'abbé Corbillé, une fois arrivé près du presbytère, avait tenté de s'enfuir, il est mené près de l'ancienne église, sur la place actuelle de l'abbé Corbillé ; entouré de Perrine et Marie Guitton, il est fusillé. Les deux femmes sont alors transférées à Savenay, puis emprisonnées à Nantes où elles mourront.
Bouvron eut à déplorer plus d'une vingtaine d'autres habitants victimes des Révolutionnaires.
II
BOUVRON ET SES SEIGNEURS
Bouvron comptait jadis trois seigneuries : Quéhillac, Villefrégon et Vilhouin. La plus importante, Quéhillac, dont le nom renvoie à un domaine gallo-romain, était aussi au centre de la frairie du même nom. Les termes Villefrégon et Vilhouin sont composés d'un même élément initial: Ville- désignant un petit fief médiéval. Enfin, les domaines de Villefrégon et Quéhillac se situent de part et d'autre du grand chemin templier conduisant de Nantes à Redon.
LES SEIGNEURS DE VILHOUIN
Le siège de cette seigneurie était situé à l'est de la commune, dans la frairie de Paribou, à la limite des paroisses de Bouvron et Fay, au bord d'un petit ruisseau allant se jeter dans l'Isar.
LEBEL (vers 1503 - vers 1540)
Le premier seigneur de Vilhouin que mentionnent les archives est l'écuyer Guillaume LEBEL. Toutefois, on trouve aussi des mentions de Guillaume et Jean Lebel, en Bouvron, sans autres précisions, dès 1494 et 1500.
Les baptêmes des différents enfants de Guillaume Lebel nés de son union avec Jeanne MAUCLERC sont célébrés en l'église de Bouvron. Les parents sont alors qualifiés de « seigneur et dame de Vilhouin et de Bonneville ».
La famille Lebel recevait de la Ville de Nantes une rente annuelle en raison d'un terrain proche des écoles de Saint-Jean, à Nantes, près de la muraille de ville à proximité de l'Erdre. Anne Lebel lèguera, à sa mort, le produit de la vente de ce terrain aux religieux des Carmes de Nantes. C'est elle aussi qui transmettra, par son mariage, la terre de Vilhouin à la famille Cadaran.
CADARAN (vers 1540 – 1666)
Le 24 février 1548 est baptisée, en l'église de Fay, Anne, fille de «François de Cadaran, écuyer, seigneur de La Forêt, et d'Anne Lebel, demoiselle de Vilhouin ». C'est en la paroisse Saint-Donatien de Nantes qu'est baptisé leur fils Claude, le 19 août 1552, puisque François de CADARAN, également seigneur du Plessis-Tizon, demeure alors en cette paroisse nantaise. D'ailleurs, en mars 1589, François de Cadaran participe à la bénédiction d'une cloche de l'église Saint-Donatien.
A François de Cadaran succède Guillaume de Cadaran qui épouse Françoise de CHASTELLIER. En 1584, c'est à Bouvron qu'est baptisé leur fils Prégent. Celui-ci épousera Michelle CASSARD.
En 1637 on trouve mentionné au Canada un certain Louis de Cadaran, sieur de Bonneville, né à Bouvron. Le 4 février 1666, François, fils de Prégent de Cadaran, ayant épousé Antoinette BIRÉ, vend Vilhouin à Jacob Pineau.
PINEAU (1666 – 1752)
La famille PINEAU, originaire de Blain, acquit la seigneurie de Vilhouin pour asseoir sa toute récente noblesse ; et c'est par allégeance à leurs puissants seigneurs de Blain, les Rohan, que les Pineau adoptèrent, de manière provisoire, la religion réformée.
Jacob Pineau épouse le 6 août 1665, au Pont-Piétin, fief protestant blinois, Marthe JOLLAN, fille de Daniel Jollan de Clerville. Après la révocation de l'Édit de Nantes, les Pineau s'empressent de revenir à la religion catholique. Ainsi, le 16 mai 1690, Jacques Pineau, fils de Jacob Pineau et d'Anne LEROY, est baptisé en l'église de Bouvron qui n'est jamais passée à la Réforme.
Lui succèdera Alexandre Pineau, marié à Claude GALLET, et qui sera inhumé à Bouvron en août 1731. Le 19 juin 1752, Pierre Pineau vend la seigneurie de Vilhouin à Armand-Paul FOURCHÉ, seigneur de Quéhillac et Villefrégon.
En 1863, l'avocat René WALDECK-ROUSSEAU achètera Vilhouin ; il démolira l'ancienne bâtisse pour édifier une imposante demeure bourgeoise où séjournera son fils le ministre Pierre Waldeck-Rousseau. La maison sera détruite durant la Poche de Saint-Nazaire. Quant à la chapelle seigneuriale Saint Guillaume, elle est depuis longtemps disparue.
LES SEIGNEURS DE VILLEFRÉGON
Du château de Villefrégon dépendait la chapelle Saint Julien l'Hospitalier, au service des pèlerins allant de Redon vers Nantes. Celle-ci a été reconstruite il y a quelques dizaines d'années.
LA JOUE . MAURE . SAINT-GILLES (1397 – vers 1511)
Le premier seigneur de Villefrégon connu est Jean de LA JOUE, seigneur de Coyaux, mentionné dans un acte de 1397. Un document du 10 avril 1458 indique que « noble homme messire Jehan de Coeaux, chevalier, seigneur de Coeaux et de Villefresgon » a pour neveu Pierre de MAURE, seigneur de Brignan en Pontchâteau. En 1484 meurt « noble écuyer Pierre de Maure, seigneur de Brignan et de Villefresgon, grand Veneur de Bretagne » dont l'héritier est Jean de Saint-Gilles.
Le fils aîné de Jean de SAINT-GILLES épouse Louise ANDRÉ ; il meurt en juillet 1509. L'héritière est sa fille aînée Charlotte qui demeure cependant sous la tutelle de sa mère. Par son mariage avec Gilles Cybouault, Charlotte de Saint-Gilles fera entrer Villefrégon dans la famille Cybouault pour près de cent cinquante ans.
CYBOUAULT (vers 1511 – 1650)
Les Cybouault possédaient notamment Brignan en Pontchâteau, La Hélardière en Donges, Villefrégon en Bouvron.
En mars 1621, Julien GATEPAILLE rend aveu, pour des terres sises en la frairie de Sordéac, à « dame Catherine de la Picquelaie, veuve de feu René Cibouaud, chevalier de l'Ordre du roi ». Un acte du 14 juillet 1622 mentionne un différend soulevé par Catherine de la Picquelais à l'encontre de Mathieu Fourché, seigneur de Quéhillac, au sujet d'un banc dans l'église de Bouvron.
Marc Cybouault, fils de René Cybouault et de Catherine de LA PICQUELAIS, épouse, en 1627, Marie LE CHARPENTIER. Leur fille Marie épousera Louis du Bouexic.
DU BOUEXIC (1650 – vers 1700)
Le 12 mai 1650, à Rennes, Marie Cybouault épouse Louis DU BOUEXIC, conseiller au Parlement de Bretagne ; celui-ci meurt à Vannes en octobre 1678. Ce sont ses enfants qui héritent de Villefrégon. La seigneurie passera ensuite entre les mains de la famille Fourché. Toutefois, dès 1735, des actes mentionnent Charles LEMÉE, marchand tanneur, « demeurant au lieu noble de Villefrégon ».
Le château n'existe plus. Une ferme, bâtie avec des éléments de l'ancien manoir, en occupe l'emplacement.
LES SEIGNEURS DE QUÉHILLAC
La seigneurie de Quéhillac était la plus importante de Bouvron. La première présence seigneuriale est à rechercher au nord-est de La Voliais, sur le lieu appelé La Motte, vestige d'une ancienne motte castrale.
ROCHEFORT (vers 1330 – 1350)
Aliette de ROCHEFORT était appelée « dame de Quéhillac » quand elle épousa Jean de Maure ; elle mourut en 1350.
MAURE (1350 – vers 1598)
Les armes des MAURE vont figurer sur un vitrail de l'ancienne église de Bouvron jusqu'au XVIIe siècle.
En 1553, François de Maure porte le titre de comte de Maure. Il avait épousé Hélène de ROHAN ; leur fils Claude épouse, en 1554, Françoise de Pompadour et meurt en 1564.
Le 23 août 1568 commence la troisième guerre de religion. L'année suivante, le 5 juin 1569, le roi de France Charles IX écrit à sa « très aimée cousine Françoise de Pompadour, comtesse douairière de Maure, veuve de messire Claude de Maure, pour sa terre et seigneurie de Quéhillac ». Le roi demande à tous ses lieutenants généraux, gouverneurs, capitaines et divers chefs de troupes d'infanterie et de cavalerie de ne pas loger eux-mêmes ni de permettre à leurs troupes de loger sur le domaine de Quéhillac. Ce document est signé de la main du roi.
Cependant, le 18 novembre 1589, Françoise de Pompadour écrit à Jean Fourché pour lui dire qu'elle a demandé à Jean de MONTAUBAN, seigneur du GOUST en Malville, de rendre le coffre et les lettres qui ont été pris par lui, à Bouvron, chez M. Fourché. Comme le duc de Mercoeur, gouverneur de la Bretagne, n'obéit plus au pouvoir royal, le roi nomme le jeune prince de Dombes gouverneur de la province. C'est alors que celui-ci envoie une lettre à Jean de Montauban, capitaine et gouverneur du château de Blain : « Monsieur du Goust, j'ai su que vous et quelques autres étiez entrés en la maison de Quéhillac appartenant à Madame la Comtesse de Maure, de laquelle vous avez fait emporter un grand coffre de bois où sont tous les titres de la seigneurie de Quéhillac. » Il ajoute : « Je vous prie incontinent de rendre ledit coffre et tout ce qui était dedans sans permettre qu'il soit rien perdu des papiers et autres choses qui auront été pris en ladite maison. » Il déclare enfin prendre aussi en sa protection les fermiers et sujets de la seigneurie de Quéhillac.
Jean de Montauban en effet profite des troubles de la guerre pour faire des incursions autour de Blain, en pillant et tuant, jusqu'à sa reddition en 1591. Un rapport précise que les soldats de Jean de Montauban commettent quotidiennement « toutes sortes de méchancetés, même des meurtres », sans être punis ; ainsi, on les voit tuer, dans le cimetière de Bouvron, Pierre BOUDAZIN. Le rapport ajoute : « les soldats ne laissaient aucun meuble ni provisions par les maisons ».
C'est à la fin du XVIe siècle que Quéhillac passe des comtes de Maure à une famille de petite noblesse de robe, les FOURCHÉ.
FOURCHÉ (vers 1598 – 1641 et 1653 - 1865 )
En 1588, Jean FOURCHÉ, dont la famille est en partie bouvronnaise, étant ingénieur à Nantes, commande l'artillerie du duc de Mercoeur. Celui-ci le charge de faire exécuter de nouvelles fortifications dans la ville de Nantes. Comme il est un fidèle partisan de Mercoeur, Jean Fourché devient sous-maire de Nantes en 1588-1589. Il fera aussi partie d'un conseil insurrectionnel qui va notamment confisquer les biens des protestants.
Le 22 décembre 1596, Jean Fourché est élu maire de Nantes. Devant les échecs successifs de ses troupes et de ses alliés, le duc de Mercoeur pense à vendre sa reddition au roi Henri IV. Le 20 mars 1598, il renonce à son gouvernement de Bretagne et s'engage à remettre au roi la ville et le château de Nantes. Il obtient en échange notamment dix millions d'écus, pour lui et ses partisans. Or, parmi ses partisans figure Jean Fourché. En outre, Henri IV ayant été satisfait des talents de Jean Fourché comme diplomate dans la reddition de Mercoeur, accorde à celui-ci, pour compenser la perte de sa charge de maire de Nantes, celle de maître des Comptes de Bretagne.
C'est probablement à partir de la belle cagnotte procurée par le roi Henri IV que Jean Fourché fait édifier ou remanier le château de Quéhillac, que l'on peut admirer encore aujourd'hui. C'est la petite-fille de Jean Fourché, Louise Fourché, qui épousera à Nantes, en 1640, l'illustre Nicolas Foucquet.
FOUCQUET (1641 – 1653)
En janvier 1640, à Nantes, l'archidiacre Jean Fourché célèbre le mariage de sa nièce Louise Fourché, héritière de son père Mathieu Fourché, seigneur de Quéhillac, conseiller au Parlement de Bretagne, avec Nicolas Foucquet. Les Fourché possédaient diverses terres en Bouvron, dont la seigneurie de Quéhillac. Mais Guyonne Bouriau, la mère de Louise Fourché, résidait principalement à Nantes, rue de Verdun, non loin de l'Hôtel de Ville où son beau-père Jean Fourché exerça la fonction de maire.
En février 1641, Louise Fourché met au monde une fille Marie ; mais, à la suite de cette naissance, elle meurt le 21 août à Paris. Nicolas Foucquet devient alors seigneur de Quéhillac comme tuteur de sa fille Marie.
Les armes des Foucquet, dont le nom s'orthographiait ainsi au XVIIe siècle, et non « Fouquet », représentent un écureuil, avec pour devise « Quo non ascendet ? », c'est-à-dire « Jusqu'où ne montera-t-il pas ? ». L'écureuil Foucquet, seigneur de Quéhillac, montera jusqu'à devenir l'un des plus puissants personnages du royaume de France.
Nicolas Foucquet, bien qu'étant le principal seigneur de la paroisse de Bouvron, n'y est jamais venu. Il rencontrait les Fourché à Nantes, chez sa belle-mère. En 1645, il est à Nantes pour un baptême et il en profite pour régler une partie de la succession Fourché. En 1646, il engage la vente des vieux bois de la seigneurie de Quéhillac. En 1650, il perd son procès contre un seigneur de Fay, à propos de prééminences en l'église paroissiale. En novembre 1653, devenu surintendant des Finances, il vend la plupart des rentes Fourché. Le 16 décembre, il vend Quéhillac à son cousin Fourché.
Le 5 septembre 1661, Louis XIV est à Nantes où il fait arrêter, par d'Artagnan, son surintendant des Finances Nicolas Foucquet. Après un procès injuste, celui-ci est condamné à la prison à vie, victime de la jalousie de Colbert.
Quelques années après la mort de Louise Fourché, Nicolas Foucquet s'était remarié et avait eu cinq enfants, dont il ne subsiste aucun descendant. En revanche, c'est de Marie Foucquet, fille unique de Louise Fourché, dame de Quéhillac, qu'est issue la seule descendance actuelle, qui compte des membres de familles de l'ancienne noblesse de Bretagne : Kerdanet, Kergorlay, Rohan-Chabot et Saint-Pern, par exemple, selon J. Aubailly.
Le dernier Fourché porteur du nom meurt en 1865. Il s'agissait d'Amaury Fourché, maire de Bouvron de 1813 à 1817, et de 1819 à 1830. Une sœur d'Amaury Fourché épousa un WALSH de SERRANT. Après des héritages successifs, Quéhillac est entré dans la famille LE GENTIL de ROSMORDUC. Depuis plus de quatre cents ans, Quéhillac est donc resté dans la famille Fourché, même si le nom n'est plus porté.
Le château et la chapelle Saint Mathieu, inscrits à l'Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques, ne se visitent pas.
Sources :
Archives Nationales de France
Archives Départementales de Loire-Atlantique.
Archives Municipales de Nantes.
J.-J. Couëdel : Foucquet, l'écureuil maudit (2009)
H. Tremblay : Bouvron et ses villages (1994)
H. Tremblay : Le patois de Bouvron, glossaire, grammaire et contes (1999)